Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
 

I. -

Empl. trans.

A. -

[Subir le manque de] Perdre qqc. ou qqn

 

-

[En utilisant mal, en gaspillant, en négligeant qqc...]

 

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À hanter les mauvais on perd l'âme et la vie V. hanter

 

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Assûr dort qui n'a que perdre V. dormir

 

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À tout perdre est le coup périlleux : A tout perdre est le coup perilleux. (MIÉLOT, Prov. U., 1456, 192). Usurier de gens desreuglés Venez tost et me regardez ; D'usure estes tant aveuglés Que d'argent gaigner tout ardez. Mais vous en serez bien lardez Car se Dieu, qui est merveilleux, N'a pitié de vous, tout perdez. A tout perdre est cop perilleux. (Danse macabre C., 1485, 32).

 

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Celui à son aise ne dort qui craint de perdre ses biens et être mis à mort V. dormir

 

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Celui qui bien fait, il est juste qu'il ne le perde pas V. bien..

 

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Des mauvais hanter perd on l'âme et la vie V. mauvais

 

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Guerre fait perdre maints royaumes V. guerre

 

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Il perd assez qui perd son âme : Nous tenons une fame a folle Qui son corps et son honneur vent Pour argent ; mais cecy m'afole, Car vous faictes pire souvent, Vos langues tornent comme vent Au plus donnant : c'est grant diffame. Il perd assez qui pert son ame. (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 64).

 

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Il vaut mieux pour l'homme perdre son avoir que perdre son honneur V. honneur

 

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Nul ne sait ce qu'est un ami jusqu'au jour où il le perd V. ami

 

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On doit perdre une fève pour avoir un royaume V. fève

 

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On perd souvent beaucoup à petite desserte V. desserte

 

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On perd tout le bien qu'on fait à boiseur V. bien

 

-

Parole dite à homme dormant n'est pas plus perdue que n'est le châtiement au fou V. parole

 

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Où foi perd sa liberté, elle perd son mérite : Pour certain la dignité de religion est si franche et si noble qu'elle ne peult souffrir violence, et ou foy pert sa liberté, elle pert son merite. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 126).

 

-

[Par la mort]

 

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Il vaut mieux en perdre un que le remanant : Seigneurs, cilz escuiers m'a rendu recreant, Mais il a l'autre occis dont j'ai le cuer dolant ; Mais il en vaut miex perdre un que le remenant, Car si plus y joustons il en sera autant. (Brun de la Mont. M., c.1350-1400, 118).

 

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Qui perd sa mère, il perd d'amour l'escueil V. mère

 

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Par division se perdent toutes les bonnes choses du monde V. division

 

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Qui part de sa place, il la perd V. place

 

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Qui le sien perd, à l'autrui tend "Quand on perd son bien, c'est un autre qui en profite" : Regnart, entens moy bien sans ire (...). Rien n'as, mais tu voeux recouvrer Sur moy par ton malvais ouvrer. Perdu as le tien par folye, Pour ce as tu du mien envye. Thulles en parle sagement : "Qui le sien pert, a l'autrui tent." Va t'en ; du mien n'aras tu point : Vas trouver aultrui qui te doint. (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 103).

 

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Qui perd le sien, il perd le sens : Et est a advertir que voz ennemis, qui congnoissent la tirannise que faisoient voz gens, et encores congnoissent que c'est a voz subgetz chose comme insuportable, cuidans que la perte de leurs biens qu'ilz faisoient et la tirannie que on leur faisoit peussent estre cause de faire departir vosdis subgetz de vostre obeissance, car on dit en commun proverbe que " qui pert le sien, il pert le sens ", essaient a les pervertir, en parlant et faisant parler a aucuns particuliers, aucunesfois par doulceur, aucunesfois par menaces executees et reeles, en essayant a les prendre de jour et de nuyt, en leur faisantoffres tant amples que on povoit, et a moy mesmes, grandes et amples (JUV. URS., Loquar, 1440, 314).

 

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[À propos des biens de Fortune] Qui plus en a plus en perd : La bonneürté souvereinne Et la felicité certeinne Sont souverein bien de Nature Qui use de Raison la pure, Et tels biens, on ne les puet perdre. Pour ce comparer ne aërdre Ne s'i puelent cil de Fortune. Car on voit -- et chose est commune -- Que qui plus en a, plus en pert. (MACH., R. Fort., c.1341, 90).

 

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Qui perd son bon ami, plus perd qu'à perdre son avoir V. ami

 

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Qui plus a plus perd V. avoir1

 

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Qui plus y met plus y perd : Et pour ce dit voir Salmons, car on recorde de lui qu'il dist: "qui a felon cuvert fait bien ne honneur, com plus y met et plus y pert". (Bérinus, I, c.1350-1370, 189). Si tost qu'il [ Theseüs] fust partis, Aderez s'avisa De la belle au cler vis ou telle beaulté a. Par amours qui l'esprist grant trahison penssa. Ce sont les fais d'amours, ouÿ l'avez piessa, Car advenus en est maint maulx et avenra. Ly homs qui plus y met, c'est qui plus y perdra (Theseus Cologne I, 2 B., c.1361-1374, 151). [Un homme reçoit chez lui la fille qu'il veut épouser, accompagnée par son père. La nuit, il découvre qu'elle couche avec le chapelain de la maison. Le lendemain matin il s'adresse au père et à la fille] "... pource que je vous ay fait venir de loing et vous ay bien voulu monstrer que je ne suis pas homme pour avoir le demourant [var. remanant] d'un prestre, je suis content de paier vos despens." Les aultres ne sceurent que dire, qui se veoient conclus en leur tort. Voyans aussi qu'ilz sont loing de leur pays, et que la force n'est pâs leur en ce lieu, si furent contens de prendre argent pour leurs despens et s'en retourner dont ilz vindrent. Et qui plus y a mis plus y a perdu. (C.N.N., c.1456-1467, 337).

 

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Qui tout tient tout perd V. tenir

 

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Tel en beau langage propose, qui en parlant perd son propos V. langage

 

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Celui-là ne perd rien qui un bon hôte loge

 

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Il est moult dur de perdre ce que donne nature V. nature

 

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Qui tout convoite tout perd V. convoiter

 

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Qui tout veut tout perd V. vouloir

 

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Qui trop se hâte souvent perd son bruit V. hâter

 

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Tout est perdu par mauvaise garde V. garde

 

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[Ce qu'on perd n'est pas perdu pour tout le monde] Ce que l'un perd, l'autre le reçoit : Ce que l'un pert, l'autre rechoit. (MIÉLOT, Prov. U., 1456, 193).

 

Rem. Hassell 197, P121.

 

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[Perdre et (re)trouver]

 

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C'est trop perdu qui ne recouvre V. recouvrer

 

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On sait ce qu'on perd, mais on ne sait pas ce qu'on trouve : Elle [Madame d'Autriche] nous laisse, en la fleur de son eage, Trop tost, helas, on le voit par esprouve : On scet qu'on pert, mais on ne scet qu'on trouve. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 169). Tout le reclame [le comte Englebert de Nassau] et viconte et vidame, Seigneur et dame et gens de rice espreuve : L'on scet qu'on perd, mais l'on ne scet qu'on treuve. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 398).

 

Rem. Hassell 224, S22 ; DI STEF., 667a, perdre.

 

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Pour un perdu deux recouvrés/retrouvés : Et puis qu' elle ne puet ravoir Jamais son ami pour avoir, Pour pleindre, ne crier, ne braire, Ne pour chose qu'elle puist faire, Et aussi que de sa nature Oublie toute creature Legierement, quant ne la voit, On puet bien penser, s'elle avoit De ses amis damage ou perte, Que briefment seroit si aperte Que d'un perdu deus retrouvez Li seroit encor reprouvez. (MACH., J. R. Nav., 1349, 241). Lors pristrent toutes a dire par commun que bonne dame avoient voirement et qu'il n'estoit autre service que de servir au Dieu et a la Deesse d'Amours et leurs commandemens faire, et dient que en brief bien seront pourveues. Lors fu trouvé un proverbe par elles qui disoit : "Pour un perdu, .II. recouvréz." Ainsi pristrent les dames et damoiselles qui sanz amis estoient conffort comme devisié vous ay. (THOM. SALUCES, Chev. errant W., 1394, 469). Pandu soit il qui se fira En femme qui deux amys a ; Qui plus y mect plus y perdra ; Pour ung perdu deux couvrera. (Chans. XVe s. P., c.1430-1500, 76). S'il pert son temps voise autre part, A son maistre ne desplaira Mais luy dira : "Dieux y ait part, Veez là l'uys !", a qui ne plaira, Ou en disant luy complaira : "Mon amy, couvrez vous, couvrez !" Pour ung perdu deux recouvrez. (CHAST., Temps rec. D., 1451, 62). ESPOIR. Pour ung perdu, deux retrouvés. Se tu as ung seul bien perdu, Cent en auras, mieux approuvés, Plus gros, plus grandz et plus ouvés, Il n'en fault pas estre esperdu, Car Amours a son arcq tendu, Pour conquerir ses proyes haultes. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 578).

 

Rem. Morawski 1701 : Por un perdu deus retrovez ; Hassell 197, P122 ; DI STEF. 666c, perdre. Formule proche dans DESCH., Oeuvres Q., t.2, c.1370-1407, 106 ; à propos de courtisans : Pour un perdu, une douzaine en sourt.

 

-

[Perdre et/ou gagner]

 

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Les plus ("ceux qui sont le plus nombreux") parfois vont victoire perdant V. plus

 

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On croit avoir (tout) gagné et on a (tout) perdu V. gagner

 

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Qui un bon en perd et un bon en gagne, il n'a cause de trop se douloir : ...elle regarde le Chevalier Flamboyant et lui dist : "Sire chevalier, vostre bonne chevalerie fait bien dire de vous et moy mesmes me loe de vostre bonne proesse, car se vous n'estiez quy les autres resveilliez par vostre bien fait, nostre feste fust comme nue, car il y adesja passé quatre assamblees que le preu Norgal nous a failly. Non pourqjunt qui ung bon en pert et ung bon en gagne, il n'a cause de trop se douloir" (Percef. V, R., c.1450 [c.1340], 470).

 

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Souvent perd on son plaid à parler nicement V. plaid

 

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Celui qui a perdu, tout aussitôt on le gabe : "Ha ! dit li maronniers, comment vous appel-on ? Vous avez bon cheval ; il sent bien l'esperon : Vous n'avez pas esté oiseux, bien le voit-on." - "Amis, dit li rois Pietres, il est bien de raison : Celui qui a perdu tout adez le gab'-on." (CUVELIER, Chron. Guescl. C., t.2, c.1380-1385, 63).

 

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Celui qui se défie du donneur, doit bien perdre le don : Celui aussi de qui tous dons viennent entierement veult estre requis d'entiere pensee. Ayes semblablement ferme attente a ce que tu requiers, car l'oreison ne proufite, si non en tant que la foy du requerant lui donne de merite. Car doit bien perdre le don qui se deffie du donneur, et follement demande qui pense estre escondist. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 164).

 

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[Moralité de la fable Du chien qui passoit l'eau et portoit une piece de chair (Le chien, voyant l'ombre de la piece de chair, ouvre la gueule pour happer l'ombre)] Celui perd tout qui tout convoite : ...qui convoite, il se mect en danger de perdre tout, comme la vielle qui ne fut pas contente de soy seoir sur une selle, mès voulut seoir sur deux, et elle cheut et fut sans selle. Celluy pert tout qui tout convoite : Ceste raison est assez droicte. (Ysopet III B., c.1400-1500, 387).

 

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On peut perdre en un jour ce qu'on a mis un grand temps à conquérir : Si vous conseille que, entrues que vous en poés issir à vostre honneur, vous en issiés et prendés les offres que on vous presente ; car, monsigneur, nous poons plus perdre sus un un jour que nous n'avons conquis dedens vingt ans. (FROISS., Chron. L., VI, c.1375-1400, 4).

 

Rem. Morawski 156 : On perd en peu d'eure ce qu'on a gaigné en long temps.

 

-

Qui commence et ne parfait, il a perdu ce qu'il a fait V. commencer

 

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Qui tout veut tout perd V. vouloir

 

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Tôt perd qui a forte partie : LA MORT. Les plains, les lamentacions Des desolez, par luy deffaiz, Avec les maledictions De ceulx qui portoient les faiz, Du sang la grant effusion, Des mors sans juste occasion, En ont esté cause en partie. Tost pert, qui a forte partie. (DU PRIER, Songe past. D.-M., c.1477-1508, 121).

 

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Tout ce qui est/chiet en aventure/en péril n'est pas perdu : Et Rose, la royne, a moult de coer priet A Dieu le tout- poisant, que son coer ot plaïet, Que la vitoire il ait a son pople envoïet. Mais elle ara le coer assès tost courechiet Plus que n'ot onques mais et de doel desvoïet ! Mais depuis assés tost r'ot-elle le coer liet, Par .I. gentil bastard qui li fist amistiet. Il n'est mie perdut tout chou qu'en peril chiet. (Baud. Sebourc B., t.2, c.1350, 162). Il nous sera bien mal advenu se nous perdons nostre roy et nostre damoiselle. Le pays sera en grant orfenté de seigneur qui le gouvernera. Beaulx seigneurs, dist le cappitaine, il n'est pas tout perdu quanqu'il em peril gist. Ayez fiance en Jhesucrist, et Il vous gardera. (ARRAS, c.1392-1393, 114). Sy fut Thibault moult dollant et non pourtant luy respondi ausques froidement : "Ce qui gist en advanture n'est mye du tout pardu, vassal..." (Guill. Orange T.H.G., t.1, p.1450, 296). Quant paiien l'on veü [Jourdain étendu par terre, estourbi par un coup], se sont resvigurez, Bien cuident que mors soit et a se fin alez, Mais nonn est : mainte cose, oÿ dire l'avez, Gist en peril souvent, c'est fine veritez, Qui n'est mie perdue. (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 734).

 

Rem. Morawski 1372 : N'est pas perdu quanque en peril gist ; Hassell 197, P130.

 

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Tout doit perdre qui tout convoite V. convoiter

B. -

Empl. abs. [Ne pas obtenir l'avantage, être perdant]

 

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Désespoir fait perdre l'homme V. désespoir

 

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Le croire légèrement fait décevoir et perdre mainte gent V. croire

 

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Mauvais achat fait qui perd plus qu'il ne gagne V. achat

 

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Nul n'y perd sans que quelqu'un n'y gagne : Et furte ache conseillie et d'acort qu'il se rendirte eus et la ville de Dinant a la vollonté de mon trèsredoubté segneur monsieur le duc de Bourgogne et de monsieur de Charolois son fils, et incontinent il firte ouverture et delivrerte les portes et les clés, de laquelle rendision pluseurs furte trèsjoeux et pluseurs très courchiés, car on dit communement : tenus ne pert, queune saquy [l. que n'i a quy] ne gaigne. (JEAN DE HAYNIN, Mém. B., t.1, 1466-1477, 171). LA MORT. Savez vous, recomanderesse Point ung bon lieu pour me loger ? J'ay bon mestier que on m'adresse Car nul ne me veult herberger, Mais j'en feray tant desloger Que on cognoistra mon enseigne ; Mourir fault pour vous abreger : Nul ne pert que autre ne gaigne (Danse macabre femmes H., p.1480, 118). Pour l'heure de ce siège d'Arras estoit madamoyselle de Bourgongne à Gand entre les mains de ces très desraisonnables gens, dont luy en survint perte et prouffit au roy : car nul n'y pert que quelcun n'y gaigne. (COMM., II, 1489-1491, 190).

 

Rem. Morawski 1409 : Nul ne pert qu'autre ne gaigne ; Hassell 197, P118.

 

-

Si on gagne aujourd'hui, on perd demain V. gagner

II. -

Empl. intrans. ou pronom.

 

-

À battre la mauvaise gerbe se perd la peine du vilain V. gerbe

 

-

Celui qui a perdu veut après épargner : ...Sarrasin faisoient le passage gaitier Si c'on ne les pooit de riens adamagier, Car cis qui a pierdut voet apriès espargner, Dont ou roi de Baudas n'i ot que courechier. (Baud. Sebourc B., t.2, c.1350,).

 

-

Jamais bienfait ne se perd V. bienfait

 

-

Il fait bon perdre pour pire esquiver : ...donnez du vostre, car il fait bon perdre, pour pis eschever, et mieulx vault donner une partie du vostre pour sauver le remenant, que tout perdre sanz ce que vous en aiez gré. (Bérinus, I, c.1350-1370, 53). [Var. Et sy dist Salemons c'on doit bien donner le tourtel pour garder les grans pains du four]

 

-

[Sentence] Les conquérants craignent de perdre et les perdants espèrent recouvrer : Les conquerans ont la doubte de perdre, et les perdans ont l'espoir de recouvrer. Cil qui a le dessus en sa fortune s'orgueillist et s'endort et entroublie ez delitz de sa conqueste. Et celuy qui est au desoubz aguise son engin a la presse de son engoisse, et, s'il n'a esperance du destour de son maleur, si peult il esperoir retour de le eur de son ennemy. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 139).

 

-

On peut trop perdre par se hâter V. hâter

 

-

Par un seul clou se perd un fer : Par ung seul clou se pert ung fer ["on gâche, on peut gâcher un fer"]. Par ung fer se pert bien ung pié. Par ung pié se pert ung cheval. Par ung cheval se pert ung homme. Par ung homme se pert ung regne. (MIÉLOT, Prov. U., 1456, 197).

 

-

Nul homme ne peut mieux se perdre que à oisiveté s'aerdre V. homme

 

-

Tel cuide gagner qui perd : ...aucuneffoiz tel cuide gaigner qui pert. Et là où vous voullez aller, il y a plusieurs dangers et y fault proceder de sens rassiz et avoir grant conduite. Si ne sçavés vous pas encores tous les motz de la messe. (BUEIL, I, 1461-1466, 62).

 

-

Une chance ne peut durer toujours, un temps elle se perd et puis l'autre revient : Toutdis ne poet durer une fortune, Un temps se piert et puis l'autre revient. (FROISS., Rond. B., c.1365-1394, 96).

 

-

Tout se perd sauf le bien qu'on a fait : Le prince est gouverneur et chief Des membres du corps politique : Ce seroit bien doulant meschief S'il devenoit paraliticque Ou voulsist tenir voye oblicque A l'estat pourquoy il est faict. Tout se pert fors que le bien faict. (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 57).

 

Rem. Cf. aussi Morawski 526 : De noient se corroce qui noient ne pert, 1503 : On ne doit perdre lo pou por lo prou, 1973 : Qui lui pert d'autrui ne joit, 2067 : Qui pert, au sein à mere quert, 2068 : Qui pert et retreuve ne scet que deul est, 2069 : Qui petit a et petit pert de grant se diaut (forme de se doulouir "se plaindre"), 2070 : Qui petit a petit pert, 2079 : Qui plus a mis plus perde.

III. -

Part. passé en empl. adj. ou subst.

 

-

À un perdu, n'y faut point de godet : Ce molinet tant vermolu devient Que nul n'y vient apporter sa monnee, Il cline en bas, ame ne le soustient, Ni entretient, ne scet a quoy il tient Qu'on luy retient une demye annee ; Sa destinée est d'avoir une annee D'orge vanée, ou le port d'ung baudet ; A ung perdu, n'y fault point de godet. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 769).

 

-

Il n'est chose si perdue comme bonté non reconnue V. bonté

 

-

Où conseil n'a tout est perdu V. conseil
 

Lexique de proverbes Pierre Cromer

 Article 2/17 
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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[DÉCT : perdre ]

"Perdre" : ...plusieurs princes et tres notables hommes qui en pardirent ame, corps, honneur et meismement leur seigneurie. (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 174).

 

-

Empl. abs. "Perdre" : ...et aussi aucune fois perdoient les nostres, mais plus gaignoient (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., I, 1404, 240).
 

Pizan Joël Blanchard / Michel Quereuil

 Article 3/17 
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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[DÉCT : perdre ]

I. -

[Le compl. d'obj. désigne une pers.]

A. -

Empl. trans.

 

1.

"Être privé de"

 

a)

"Être séparé d'une personne par la mort" : Adonaÿ, Dieu tout puissant, Que doy je faire, pouvre doulente, Puis que j'ay pardu mon enfant ! (Pass. Auv., 1477, 130). Jamays plaissance Certes n'aré, - puis que je pars mon amy doulx. (Pass. Auv., 1477, 188).

 

-

P. exagér. [D'une pers. affectée par un deuil au point de désirer mourir] : Las, Dieu, helas ! Las, quel doleur ! De pas en pas - je pers ma seur. Plus q'ung presseur Doleur l'estrainct. (Pass. Auv., 1477, 241).

 

b)

"Laisser s'échapper"

 

-

[Une proie, à la chasse] : Garde bien de pardre la proye ! (Pass. Auv., 1477, 140).

 

-

[Un captif dont on a la garde (ici, les âmes des défunts, de l'enfer)] : Maulditz, alés vous en trestous A la porte ! Sarrés la fort Et gardés qu'il non entre a nous, Affin que ne perdions nul mort. (Pass. Auv., 1477, 226).

 

-

"Laisser emporter (ici, le corps de Jésus au sépulcre, gardé par des soldats)" : Il fault donc a Pilate aler Luy prïer qu'il y mecte garde Tantost, affin qu'on ne le perde, Car sans Pilate ne pouvons. (Pass. Auv., 1477, 271).

 

2.

"Causer la perte de"

 

a)

"Damner" : Helas, que farey, mes amis ! Si a mort condempne Jhesus, Je suis perdu - il est conclus -, Comme Percula m'a mandé, Car ceste nuyt elle a songé Choses terribles et contre [l. terribles contre] moy. (Pass. Auv., 1477, 169).

 

b)

"Conduire qqn à sa perte, anéantir, ruiner" : SATAN. (...) Nous sommes perdus, Luccifer, Car ce Jhesus, qui a pris mort, Est homme Dieu. Las, quel remort ! Il vient seans pour nous guaster tous. (Pass. Auv., 1477, 226).

B. -

Empl. pronom.

 

1.

RELIG. "Tomber dans la perdition" : Croyés mes parolles et dicts Pour faire aux diables desfarde. Nulz de vous amis ne se parde Par ire, orgueulh ne luxure ! Le feu d'avarice nul n'arde ! (Pass. Auv., 1477, 125).

 

2.

"Ne plus retrouver son chemin, s'égarer"

 

-

[Allusion biblique (Matth. 18, 12-14)] Brebis perdues. V. brebis

II. -

[Le compl. d'obj. désigne une chose] "Être privé de"

A. -

"Ne plus avoir la jouissance d'un bien"

 

1.

[La perte est d'ordre matériel] : Maintenant, certes, je vouldroye Avoir perdu mon reaulme tout Et que Jehan vesquit, qui que l'oye ! De doleur ne puis dire mot. (Pass. Auv., 1477, 108). Maulditz Juïfz, pleins de maleur, Vostre seigneur Advés tüé en vil torment. Vous en perdrés bien et honneur, En grant doleur ; Punis serés furieusement ! (Pass. Auv., 1477, 247). Mauldit pecheur, Suis fol et nice D'avoir ce Jhesus condempné, Car j'ay eu peur Perdre l'office De mon seigneur Doulx et propice. (Pass. Auv., 1477, 276).

 

-

"Ne pas obtenir (le bénéfice escompté)" : Je croy que ne perdons que tant. Or sa, nous sommes quictes de l'esmende. (Pass. Auv., 1477, 179).

 

2.

[La perte est d'ordre moral] : Vous en perdrés bien et honneur (Pass. Auv., 1477, 247).

B. -

[La perte affecte l'intégrité physique ou morale d'un être vivant] "Ne plus avoir"

 

1.

[La perte est d'ordre matériel ou physique] : Oncques ne heux pis En grief douleur. - Las, je pars toute ma substance ! (Pass. Auv., 1477, 188). Perdre puissiés vous les artoys ! Or levés sus ! (Pass. Auv., 1477, 209). Si ne perdons nostre pouvoir, Ja ne luy larrons os entiers. (Pass. Auv., 1477, 229). Homme vicieulx, Il voulsit mieulx - pour ton profit Perdre tes yeulx Faulx, envieulx, - que croire au dit De ce mauldit dampné, Veu qu'il s'ensuit Que Jhesu Christ - soit condempné. (Pass. Auv., 1477, 246).

 

-

[D'une pers. qui est sur le point de se noyer] Perdre l'haleine. V. haleine

 

-

Perdre appetit. V. appetit

 

-

Perdre le goust. V. goust

 

-

Perdre la vie. V. vie

 

-

Perdre corps et ame : Je m'en vaiz perdre corps et ame. Ne scey a qui moy retourner. (Pass. Auv., 1477, 208).

 

2.

[La perte est d'ordre intellectuel]

 

-

Perdre la memoire. V. memoire

 

-

Perdre le parler. V. parler2

 

-

Perdre son sens. V. sens

 

3.

[La perte est d'ordre spirituel] : Je m'en vaiz perdre corps et ame. (Pass. Auv., 1477, 208).

 

4.

[La perte est d'ordre affectif]

 

a)

[Sentiments joyeux] : Frere, j'ay perdu ma plesance Et la joyeuseté que j'avoye, Deppuis que j'ay veu en ma presance Le chief de Jehan que tant amoye. (Pass. Auv., 1477, 108). ...je pers toute ma joye ! (Pass. Auv., 1477, 109). ...je pers tous actours Et soubjours. (Pass. Auv., 1477, 181). Je pers toute joye et soulas (Pass. Auv., 1477, 191). Je pers toutes joyes et saulx (Pass. Auv., 1477, 200).

 

b)

[Sentiment douloureux] "Ne plus être affecté par" : En ceste joyeuse estanpie Et en ce chant melodïeux, Doleurs pers ; plus ne suis marrie, Pour ce que voy Dieu glorïeux. (Pass. Auv., 1477, 280).

C. -

"Ne pas avoir l'avantage, au jeu"

 

-

Perdre la partie. V. partie

 

-

Empl. abs. : Maliferas ; tu as perdu ! Janus et tu estes dehors. (Pass. Auv., 1477, 202).
 

Passion d'Auvergne Jean-Loup Ringenbach

 Article 4/17 
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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[DÉCT : perdre ]

Au propre. "Perdre qqc." : ...car ceuls qui sont fors en telz cas ne ont pas esperance d'eschaper ou evader, et ne font force de tele mort souffrir et sont constants sens perdre pour ce usage de raison. (ORESME, E.A., c.1370, 206).

 

-

[Le compl. d'obj. désigne une chose abstr.] : Et posé que infortunes li venissent, si ne pourroit il pas de legier estre mué ou osté de sa felicité, se il ne par estoient tresgrans et pluseurs, et se par ce il perdoit sa felicité, il ne reseroit pas beneuré en petit temps (ORESME, E.A., c.1370, 136).

 

.

Perdre sens et avis : Aucune fois par teles choses il perdent sens et avis (ORESME, E.A.C., c.1370, 364).

 

.

P. méton. Perdre la teste. "Perdre la vie" : Si comme de ce qu'en une cité fu deffendu sur painne de perdre la teste que nul estrange ou forain ne montast sus les murs de la cité. (ORESME, E.A.C., c.1370, 324).
 

Oresme Charles Brucker

 Article 5/17 
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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[T-L : perdre ; GD : perdre ; GDC : perdre ; DÉCT : perdre ; FEW VIII, 221b : perdere]

I. -

Empl. trans.

A. -

Perdre qqc. "Perdre"

 

1.

[Obj. concr.]

 

-

Perdre coq et poule. V. coq

 

-

Perdre corps et meuble. V. meuble1

 

-

Perdre corps et visage. V. corps

 

-

Ne pas y perdre maille. V. maille2

 

-

P. plaisant. Perdre ce qui cheoit à terre : LA FEMME. Ha ! monseigneur, il m'a frappé : Ne m'en ferez vous aultre droit ? CAYPHAS. Il a perdu ce qui cheoit A terre, dont ce poise moy (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 181).

 

Rem. Cette loc. semble signifier qu'une pers. en a frappé une autre comme par inadvertance, le coup lui ayant échappé, ainsi qu'un objet qu'on laisse tomber par maladresse.

 

-

Empl. abs. [Pour signifier le caractère aléatoire de l'issue d'une guerre] C'est pour y perdre ou pour avoir : Nulluy ne se doit esmouvoir Des grans fortunes de la guerre ; C'est pour y perdre ou pour avoir ; Nulluy n'est point sceur y conquerre. A qui y survient la tonnerre Ne se peut de ce garantir ; C'est la planete qui defferre Les combatans a son plaisir. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 482).

 

2.

[Obj. abstr.]

 

-

Perdre contenance. V. contenance

 

-

Perdre son haleine. V. haleine

 

-

Perdre son parler. V. parler

 

.

C'est parole perdue. V. parole

 

-

Perdre son/ses pas. V. pas

 

-

Perdre sa peine. V. peine

 

-

Perdre son procès. V. procès

 

-

Perdre sa saison. V. saison

 

-

Perdre ses sentements. V. sentement

 

-

Perdre (la) vie. V. vie

 

-

Perdre la vue. V. vue

B. -

Perdre qqn

 

1.

"Être séparé de quelqu'un par la mort" : Hee, filz, beaulx filz, or est tu mors ! Mon cueur trespaces de vie a mors. Helas, comme suis en grand doleur, Quant je voy que je part mon seigneur ! (Pass. Autun Biard F., 1470-1471, 119).

 

-

[P. méton. du compl.] Perdre la compagnie de qqn : Helas, que fera la pouvre Marie Quant de sont enfent pert la compaignie ? (Pass. Autun Biard F., 1470-1471, 141).

 

2.

Perdre qqn de vue. V. vue

II. -

Empl. pronom. à sens passif. [D'un droit] "Être rejeté" : JUSTICE. Quoy que vous soyez protestans, Misericorde, belle amye, Mon droit si ne se perdra mie Ne, pour vostre hault langaiger, Ne pouez mon droit obliger (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 689).

III. -

Part. passé en empl. adj.

 

-

ART MILIT. Jeter à pierre perdue. V. pierre
 

Mystères Jean-Loup Ringenbach

 Article 6/17 
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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[DÉCT : perdre ]

"Perdre"

A. -

"Être privé de qqc. ou de qqn"

 

1.

"Cesser d'avoir (un bien)" : Tu feras ce que te diray, Cochet, et riens n'y perderas : Un grant feu cy m'alumeras, Conme s'ardisses une famme... (Mir. fille roy Hongrie, c.1371, 19). Vostre chastellain ci m'envoye, Qui me fait dire (...) Que se brief (...) Ne li aidez a li deffendre, Vostre chastel li convient rendre, Et si perderés vostre terre (Mir. fille roy, c.1379, 65).

 

-

Empl. abs. : Je n'ay pas donc perdu granment Se de Paris ne m'ay meu. (Mir. chan., c.1361, 164). ...vostre roy Alfons M'a courroucié ; il a mal fait : Si vous fault comparer son fait, Et li mesmes voir y perdra (Mir. Oton, c.1370, 336). Vous perderez trop malement, Sire, se vous ce change faictes (Mir. st Alexis, 1382, 320).

 

.

[P. oppos. à gagner] : Il faudra (...) que croie sanz contredit Ce que le prisonnier m'a dit, Si que, doie perdre ou gangnier, Certes nu le verray [mon gendre] baignier (Mir. fille roy, c.1379, 97).

 

2.

"Être séparé de qqn par la mort" : Se perdu avez une femme, Cent en arez, se vous voulez (Mir. emper. Romme, 1369, 309).

 

3.

"Être privé de l'usage d'(une faculté) ou d'(un membre)"

 

-

[Faculté] : Lasse ! j'ai perdu le taster. (Mir. nat. N.S.J.C., c.1343, 214). Car il pense, ains qu'il perde vie, Sire, a vous de plus en plus nuire (Mir. Amis, c.1365, 11). De joie ont perdu la parole Touz deux et sont en paumoisons (Mir. emper. Romme, 1369, 310).

 

-

[Membre] : ...lasse ! mes mains Ay perdu. (Mir. nat. N.S.J.C., c.1343, 214). Di a ma dame que je vueil Tresvoulentiers perdre un mien oeil Pour li veoir. (Mir. emp. Julien, 1351, 218).

 

4.

"Ne plus pouvoir trouver qqn" : LE ROY. M'amie, (...) Par devers vous retourneray, Quant ma gent retrouvé aray Que perdu ay. (Mir. femme roy Port., c.1342, 165). ...quant ilz s'en revindrent, ilz obliérent l'enfant Jhesu en Jherusalem et le perdirent trois jours (Mir. Theod., 1357, 80).

 

-

Part. passé. [En constr. attributive] "Égaré" : JOSEPH. (...) Conment ! Jhesus est il perduz ? (...) NOSTRE DAME. E ! lasse ! grant douleur m'espoint. Je ne scay ou il est alez. (Mir. nat. N.S.J.C., c.1343, 230). Cet homme ne trouverons pas, Il est perdu. (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 294).

 

5.

"Ne plus pouvoir trouver qqc." : Mais en pensant conme esperdu Ay je mon droit chemin perdu (Mir. march. larr., c.1349, 115).

 

6.

"Gaspiller" : Tu crois avoir perdu ton temps Et si te tiens pour deceu : Sachiez le moinne qu'a veu Si est ta femme en verité. (Mir. Theod., 1357, 93). Perdre aussi bien va son langage Conme s'il aloit batre Saine (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 235). Musehault, certes, il me semble Que noz pas gastons et perdons. (Mir. st Alexis, 1382, 328).

 

7.

"Ne pas obtenir l'avantage dans (une bataille)" : Au mains ont il perdu sanz faille Ceste premeraine bataille (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 58).

B. -

"Priver qqn de qqc."

 

1.

"Déconsidérer, déshonorer"

 

-

Part. passé. [En constr. attributive] : SUER MARIE. (...) Bien voy que nous sommes perdues, Puis que l'evesque a main nous prent (Mir. abbeesse, 1340, 95). LA FILLE. (...) Aidiez moy, ou perdue sui. J'ay meschief et assez annuy A porter, voir. LA BELLE ANTE. Et de quoy ? je le vueil savoir Ysnellement. LA FILLE. Je suis malade vraiement D'enfant ; le celer riens n'y vault. (Mir. Theod., 1357, 104). Nous sommes perduz et honnis. (Mir. Berthe, c.1373, 204).

 

2.

RELIG. "Damner"

 

-

Part. passé. [En constr. attributive] : Se je crestiennez ne suyz, Perdu seray et mal bailliz. (Mir. enf. diable, c.1339, 50). Ha ! sire, le doulx roy haultismes Me het, et il a bien raison (...). S'en cest estat fas plus demour, Je suis perdue. (Mir. nonne, 1345, 344). Las ! je suis perduz et dampnez Se je ne met en moy deffense. (Mir. chan., c.1361, 169).

 

3.

[En parlant d'armées en guerre] "Défaire, battre"

 

-

Part. passé : ...a effors Viennent ci, et est leur entente De vous conquerre sans attente. Perduz sommes et essilliez, Sire, se ne nous conseilliez Sur cest affaire. (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 55).
 

Miracles Pierre Kunstmann

 Article 7/17 
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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[T-L : perdre ; DÉCT : perdre ; FEW VIII, 221b-223a : perdere]

I. -

Empl. trans.

A. -

[Le compl. désigne une chose concr. ou abstr.]

 

1.

"Être privé de qqc. que l'on possédait auparavant" : ...ainsi qu'il advint que le pays fut saysi par les adversaires et les hommes en fuite et lui eschappast nud, fut interrogié par autres s'il avoit tout perdu, respondit qu'il portoit ses biens, disant : "Je porte ma science que larrons ne me sauroient oster". (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 62 r°). Perdirent les chrestiens, comme autre part est dit, XV cités, XII chasteaux et IIIc mil hommes mis à mort, qui fut piteuse chose (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 127 r°).

 

2.

"Être privé (de l'usage d'un membre)" : Qui fit a Hanibal guerroyer Ytalie, passer les montaignes, souffrir extremes froidures jusques a perdre l'ueil ? Amour de vaine gloire (GERS., Concept., 1401, 412).

 

3.

Avoir son terme perdu. "Ne pas avoir eu ses menstrues" : Et se femme a son terme perdut, sy fache fumigation de la poudre de celle pierre [de sayete] en ses partyes desoubz. Et ly fumiere de ly ayde a ceuls qui ont la caduch. (MANDEVILLE, Lap. M., c.1350-1390, 184).

 

Rem. Cf. A. Goosse, Les Dial. belgo-rom. 17, 1960, 73.

 

4.

Au passif. Estre perdu

 

a)

[Des fruits, d'une récolte] "Être gâté, détruit" : ...au moïen duquel yver l'on ne peut labourer et ce qui estoit en terre fut gelé et perdu, dont vint famine et de famine mortalité (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 100 v°). ...survint si grande tempeste et tumba si grosse gresle que les blez en furent perduz et les vignes et les forestz (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 120 r°).

 

b)

[D'un objet] "Avoir disparu" : ...mais leurs livres ont esté perduz ou ne sont translatez (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 33 r°).

B. -

[Le compl. désigne une pers.]

 

1.

"Être privé de la présence d'une personne par la mort" : La femme ne puet adopter, se n'est par mandement de prince, qui lui soit donné en soulas d'enfans mort ou perdus. (Sacr. mar., c.1477-1481, 60).

 

2.

"Causer la mort, faire périr (physiquement ou spirituellement)" : Notez : (...) de Roboam, auquel les joennes disoient qu'il valoit plus que son pere Salomon, et perdi son peuple (GERS., Annonc., a.1400, 234). Tout [ce] je feis, Orgueil, parce que je leur feiz desirer avoir science semblable a Dieu ; et depuis quans en ay je perduz et confonduz des plus grans comme les [geans], comme Nabugodonosor, Holofernes, Anthioche, Zersés et autres sans nombre. (GERS., Noël, p.1404, 304).

 

-

[L'agent n'est pas exprimé] (Estre) perdu : Nous lisons que ou diluge et en la subversion des V citez peccherresses les petis enfens furent perdus avec les grans. (GERS., Pent., p.1389, 80). ...il fut blecié à mort et ses gens perduz, mors et desconffiz. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 55 r°).

C. -

[Le compl. désigne une chose abstr.]

 

1.

[Avec une idée positive] "Être débarrassé, soulagé de qqc. de désagréable"

 

-

Perdre toute douleur : Aussi à l'umeur peccante vit la disposicion du ciel convenable pour y fere applicacion et le fist, au moïen de laquelle, le roy Daire, qui longtemps avoit esté sans avoir reppox nuyt ne jour, perdit incontinent toute doulleur et fut gary (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 52 v°).

 

2.

[Avec une idée nég.]

 

a)

"Mourir"

 

-

Perdre corps et vie : Predist aussi à messire Pierre des Essars son affere s'il sailloit de la Bastille, ce qui advint, car depuis il perdit corps et vie par le duc de Bourgongne. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 151 v°).

 

-

Perdre la vie : Qu'au mains la plus grosse partie Des gens devroit perdre la vie (LA HAYE, P. peste, 1426, 40).

 

b)

"Oublier l'usage de qqc." : ...et conserver ceste science [l'astrologie], car si vous la perdez, soyez seur que les autres princes estranges ne la perdront pas, mais s'en sauront bien servir en temps et en lieu (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 7 v°).

II. -

Empl. pronom.

A. -

Au propre. "S'égarer" : ...fist tenir et observer le cours de la Lune et autres corps celestes aux navigans de Phenice, de quoy ilz se trouverent bien et en fut moult estymé des seigneurs et du peuple car par avant plusieurs se perdoient et aloient si avant navigant, qu'ilz ne se sçavoient retourner. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 32 r°).

B. -

"Cesser d'exister, disparaître" : ...comme il soit aussi que la memoire de plusieurs se soit perdue par la depopulacion des royaulmes et destruction des cités et des grandes universitez, combustion de livres et choses semblables (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 9 v°).

III. -

Part. passé en empl. adj. "Qui est mal utilisé, gaspillé" : Neantmoins je scay bien que c'est grande consolacion d'oïr parler de Dieu et des choses divines, et n'est pas temps perdu, jassoit ce que on ne entent pas tout, comme les simples gens oÿent a proffit le service de l'eglise en latin combien que ne l'entendent mie. (GERS., Trin., 1402, 155).
 

Littérature didactique Hiltrud Gerner

 Article 8/17 
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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[DÉCT : perdre ]

I. -

Empl. trans.

A. -

"Ne plus avoir la possession de ce que l'on avait"

 

1.

"Cesser d'avoir la possession de qqc."

 

-

[Au jeu] : J'ay perdu tout le myen aux dez, J'ay perdu aux cartes et quilles, J'ay perdu mes biens gourmendez, J'ay perdu tout en volles filles, J'ay perdu chevaulx et estrilles, J'ay perdu robe et hoppellande (LA VIGNE, S.M., 1496, 386).

 

-

[Le compl. d'obj. désigne une partie du corps] : PREMIER [BRIGANT]. Il est saison Maintenant de faire merveilles. SECOND. Se je ne leur foys leur raison, Je veulx perdre les deux oreilles. (LA VIGNE, S.M., 1496, 271).

 

2.

[Le compl. d'obj. désigne une pers.] Perdre qqn. "Ne plus le voir du fait de la mort" : ...car il veoit bien qu'il perdoit ung des bons amys qu'il eust au monde et ung des loyaulx, des beaulx et des bons princes de son royaulme. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 312).

 

3.

"Dépenser qqc. sans en tirer le profit escompté" : LA MERE. J'ay dont bien perdu mes chandelles, Mes grans offrandes et prieres, Puisque, par leurs faulces cautelles, [les dieux païens] Me procurent tant de myseres. (LA VIGNE, S.M., 1496, 296).

 

-

Perdre son temps. "Ne rien faire d'utile" : LE CONTE. (...) A noz maisons ne pouons proffiter : Le temps perdons et si ne faisons rien. Pour ce, les champs nous volons frequenter Pour requerir bruyt et lox terrïen. (LA VIGNE, S.M., 1496, 186).

 

4.

"Damner" : Si le temps avez despendu En quelque mal, je vous promectz : S'amender, ains qu'on soit perdu, Il vault trop mieulx tart que jamais. (LA VIGNE, S.M., 1496, 284).

 

5.

"Ruiner" : Le mercredy vint une faulce poste En diligence, comme tout esperdu, Qui apporta quelque escript fait a poste Que tout estoit dessus la mer perdu. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 174).

B. -

"Ne pas obtenir la possession de ce que l'on n'a pas encore"

 

1.

[Le compl. d'obj. désigne une chose] "Ne pas obtenir" : Mais le dict bouvier perdit icelle franchise et sa paine, encore en dangier de se rompre le col. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 303).

 

2.

[Le compl. d'obj. désigne une pers.] "Laisser échapper" : BURGIBUS. Suy le de prés, Treshumblement, par motz exprés : Vella commant tu le prandras. BERITH. Tu es plus flairant que cyprès ; Jamais ainsi ne le perdras. SATHAN. Suis jë en poinct ? BURGIBUS. Tu l'assauldras Au premier par doulces parolles, Puis apprés tu le surprendras Par menaces et parabolles. (LA VIGNE, S.M., 1496, 538).

 

3.

DR. "Ne pas obtenir l'avantage dans (un procès)" : LE JUGE. Si de vous en brief n'est desdit, Claude, vostre cause perdez. (LA VIGNE, S.M., 1496, 520).

C. -

"Ne pas avoir momentanément la possession ; égarer"

 

-

Part. passé. Perdu. "Égaré, éloigné (?)" : PROSERPINE. Si tes beaux ditz ne sont present tenus, Je suis contant d'estre au gibet pendue. Propres habitz j'ay pour ce retenus ; Bailler me fault au paillart la tondue. (Pause de menestriers. Elle se mect en guise de dame bien paree et bien acoustree, fors que devers les piedz, et s'en revient.) Se j'ay esté ung bien petit perdue, De revenir ne fus oncques rebelle. LUCIFFER. Sans faire icy plus prolixe actendue, Despesche toy ; que deable tu es belle ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 480).

II. -

Empl. pronom.

A. -

Empl. pronom. à sens passif. "Se ruiner" : Et quesse cy ? A il que recongnoistre En mes pays ? Dont nous vient cest oultrage De se ruer par dedens nostre cloistre ? Il n'aura pas de tous poincts l'avantaige. A il trouvé en son faulx tripotaige, Sans coup ferir, que ma terre se perde ? Veult il avoir ainsi mon heritaige ? (LA VIGNE, S.M., 1496, 236).

B. -

Empl. pronom. réfl.

 

1.

[Le suj. désigne une pers.] "Disparaître" : Icy sainct Martin s'en fuyt cacher et le prince tire son espee pour le tuer. Nota qu'il fault faire que sainct Martin se perde soubz terre, puis revenir tantost aprés. (LA VIGNE, S.M., 1496, 435).

 

2.

[Le suj. désigne qqc. de nég.] "Disparaître" : PERE. Affin que vostre douleur forte Par le moyen de Dieu se perde Et du sainct dont cecy procede, Par devocion la vous baille, Esperant que brief vous concede Guerison et que le dueil saille De vostre corps. (LA VIGNE, S.M., 1496, 467).
 

La Vigne Annie Bertin

 Article 9/17 
FamilleStructureSans exempleCompletFormesExemplesTextesSourcesImpressionAide à la lecture
     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[DÉCT : perdre ]

I. -

Empl. trans.

A. -

"Se trouver privé de ce qu'on possédait" : Pourquoy il est assavoir que perdre en latin signifie, en une maniere, non avoir ce que on avoit devant et en estre privé de la seignourie ou possession (LA SALE, Sale D., 1451, 232).

 

-

En partic. "Ne plus savoir où se trouve ce qu'on possédait" : ...si comme le prophette dist a Dieu : "Perdes omnes qui locuntur mendacium". Ce n'est pas a dire que Dieu perde en la premiere significacion les menteurs ; car il saura trop bien qu'il seront devenus et en aura la seignourie (LA SALE, Sale D., 1451, 232).

 

-

En partic. au fig.

 

.

"Être privé d'une partie de son corps" : Je pers les mains de froit se en vostre sain et près de vostre char ne les me mettez. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 167).

 

.

"Ne plus pouvoir exercer une fonction naturelle" : Alors ce tres enflamé dart d'amours fiert le cuer de l'un et puis de l'autre tellement qu'ilz en perdirent le mangier (LA SALE, J.S., 1456, 249).

B. -

Au fig. "Ne pas recueillir le profit de" : Toutesfois conclurent a la fin que nul ne perdist sa peine et son droit, si ordonnerent que l'un le paiast a l'autre (LA SALE, J.S., 1456, 179).

C. -

"Détruire" : Doncques le vers de la response de Apollo veult dire : quand Cresus aura passé Alin, qui est ung fleuve qui estoit entre lui et Cirus, il perdera très grans royames (...). Dont Cresus entendi perdre : "id est", destruira (LA SALE, Sale D., 1451, 233).

II. -

Empl. intrans. "Connaître la défaite" : ...vous priant tous que chascun perde ou gaigne ou que soyez honorablement (LA SALE, J.S., 1456, 203).
 

La Sale Pierre Demarolle

 Article 10/17 
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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[T-L : perdre ; GD : perdre ; GDC : perdre ; DÉCT : perdre ; FEW VIII, 221b : perdere ; TLF XIII, 58b : perdre]

Empl. trans. Perdre qqc. "Ne plus avoir qqc. ; être privé de qqc."

 

-

Prov. Qui perd le sien, il perd le sens. "Celui qui est dépouillé de son bien n'a plus sa raison" : [Jean Juvénal des Ursins au roi :] Et est a advertir que voz ennemis, qui congnoissent la tirannise que faisoient voz gens, et encores congnoissent que c'est a voz subgetz chose comme insuportable, cuidans que la perte de leurs biens qu'ilz faisoient et la tirannie que on leur faisoit peussent estre cause de faire departir vosdis subgetz de vostre obeissance, car on dit en commun proverbe que "qui pert le sien, il pert le sens", essaient a les pervertir (JUV. URS., Loquar, 1440, 314).

 

Rem. Exemple antérieur à celui donné par DI STEF., 800b, tiré du Livre de la Deablerie d'Eloy d'Amerval, imprimé en 1508.
 

Lexique partiel de Juvenal des Ursins Martine Moulin

 Article 11/17 
FamilleStructureSans exempleCompletFormesExemplesTextesSourcesImpressionAide à la lecture
     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[T-L : perdre ; GD : perdre ; GDC : perdre ; DÉCT : perdre ; FEW VIII, 221a : perdere ; TLF XIII, 58b, 69a : perdre/perdu]

I. -

Empl. trans.

A. -

Perdre qqc. [une chose abstr. ou concr.]

 

1.

"Ne plus avoir, en partie ou totalement, momentanément ou définitivement"

 

a)

[P. réf. à l'intégrité physique ou morale d'une pers.]

 

-

[La perte concerne la façon d'être] : Ou est ton orgueil maintenant, Ton boban, ton fier cueur et grant ? A quel gieu, en quel lieu et temps As perdu tes cointoiemens ? (GUILL. DIGULL., Pèler. âme S., c.1355-1358, 4070).

 

-

[La perte est d'ordre physique]

 

.

Perdre la vue. "Devenir aveugle" : Avugle sui, je n'i voi goute, Perdue j'ai ma veue toute. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. St., c.1330-1331, 1480).

 

.

Perdre (la) vie. "Mourir" : Et encore ne croi je mie Que adonc je perde la vie. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. St., c.1330-1331, 8284). "Expedient est et proufit Que pour touz un perde vie Et touz ne la perdent mie." (GUILL. DIGULL., Pèler. J.-C. S., 1358, 7445-7446).

 

b)

[P. réf. à la qualité d'une chose] : Pierres en furent fendues, Et toutes orbes les nues Pour le soulel qui oscurci Et toute sa clarte perdi. (GUILL. DIGULL., Pèler. J.-C. S., 1358, 9670).

 

2.

"Causer la perte de" : GRÂCE DE DIEU. Pieça le monde fust perdu, Se ne l'eüsse maintenu. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. St., c.1330-1331, 325).

 

-

En partic. "Gâcher, gaspiller"

 

-

Perdre son temps : L'ÂME AU CORPS. Car tant com tu fus avec moi, Tresmale vie me menas Et me fëis perdre mains pas, Perdre mon temps et foloier Et par chemins tors forvoier. (GUILL. DIGULL., Pèler. âme S., c.1355-1358, 4079).

 

-

Perdre sa peine. V. peine

 

3.

Perdre sa voie. "Ne plus retrouver son chemin, s'égarer" : Quar par bos a on tost perdu Sa voie et mainz perilz y sont Aus pelerins qui seulz y vont. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. St., c.1330-1331, 9034).

B. -

Perdre qqn

 

-

Au passif "S'écarter du chemin (ici du droit chemin) que l'on doit suivre et ne pouvoir le retrouver" : LE PÈLERIN À GRÂCE DIEU. À toi me tieng, à toi m'apui ; Se ne m'aïdes, perdu sui. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. St., c.1330-1331, 11394).

 

.

RELIG. Estre perdu. "Être damné" : DIEU À JÉSUS. "Tu vois que pour celle pomme [qu'Adam mangea] Grant amende me doit homme, Et vois qu'il faut qu'il soit perdu Pour tant quë il m'a offendu..." (GUILL. DIGULL., Pèler. âme S., c.1355-1358, 6191).

 

Rem. Cf. FEW VIII, 222b : « mfr. nfr. perdu "damné" MirND ».

II. -

Part. passé en empl. adj. "Mal employé ou employé sans profit, inutile" : Comment quë auz folz soit avis Que faire bien en cest päis Soit perdu, si com visiter Les malades et conforter (GUILL. DIGULL., Pèler. J.-C. S., 1358, 5745).
 

Pèlerinages de Guillaume de Digulleville Béatrice Stumpf

 Article 12/17 
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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[DÉCT : perdre ]

I. -

Empl. trans.

A. -

"Cesser d'être en relation avec qqn, cesser de posséder qqc."

 

1.

Perdre qqn

 

a)

"Ne plus pouvoir avoir de relation avec lui" : Ainsi qu'avez oy perdit le desloyal sa femme. [Elle ne lui a pas pardonné sa trahison] (C.N.N., c.1456-1467, 181). ...oncques si bonne lavendiere ne fut, et avoyent bien grand regret que si meschantement l'avoient perdu. (C.N.N., c.1456-1467, 304).

 

-

Perdre la présence/accointance de qqn : ...me despleut beaucop par aucuns pou de jours d'avoir perdu sa presence [La vie a séparé deux amants] (C.N.N., c.1456-1467, 177). ...elle n'eust pas voluntiers perdu son accointance [Un amant souhaite rompre sa liaison] (C.N.N., c.1456-1467, 237).

 

b)

"Être séparé de qqn par la mort" : La compaignie fut moult troublée, qui eut perdu madame [Elle s'est noyé sous les yeux de ses gens] (C.N.N., c.1456-1467, 313). ...doubtant la perdre, se vint rendre aux piez d'elle et luy donnoit esperance de garison (C.N.N., c.1456-1467, 515).

 

2.

Perdre qqc. "Ne plus être en possession de cette chose, ne plus en disposer"

 

a)

[De manière définitive]

 

-

[Dans un cont. concr.] : ...s'il est trouvé qu'il aille aultre part que a sa femme, il perdra son benefice. (C.N.N., c.1456-1467, 288). Il faillit d'avoir la belle fille du bourgois, et si perdit ses IIJC.. escuz d'or que le barbier eut (C.N.N., c.1456-1467, 417).

 

.

Perdre sa santé : ...medicins solent ordonner [des remèdes] tant a conserver la santé de l'homme que pour la recouvrer s'elle est perdue (C.N.N., c.1456-1467, 467).

 

.

Perdre la vie : ...il ayma mieulx confesser verité et son peché (...) et eschapper, que le celer et tenir clos et estre en dangier de perdre sa vie. (C.N.N., c.1456-1467, 220).

 

.

Perdre un oeil : ...perdu avoit un oeil en ung assault ou avec son prince s'estoit tresvaillamment porté. (C.N.N., c.1456-1467, 109).

 

-

[Dans un cont. abstr.] : ...force fut a la belle nonnain (...) de perdre le bruyt de sa treslarge courtoisie (C.N.N., c.1456-1467, 105). ...la tresbonne fille et entiere, amant plus cher morir que perdre son honneur, ne s'en effraya gueres (C.N.N., c.1456-1467, 116). ...ne suis si ancien, ne tant desfourny de puissance naturelle, que je ne doye soucier ne perdre esperance de non povoir jamais avoir generation. (C.N.N., c.1456-1467, 557).

 

-

Perdre qqc. pour qqc. "Substituer une chose à une autre (à perte)" : ...si elle accordoit au prestre sa requeste, son maistre (...) s'en donneroit bien garde, et ainsi perdroit le plus pour le mains. (C.N.N., c.1456-1467, 454).

 

-

[Formule de style proverbial] : ...qui plus y a mis plus y a perdu. (C.N.N., c.1456-1467, 337). ...sans demander qui l'a perdu ne gaigné, le dit Thomas trousse la damoiselle sur le lit (C.N.N., c.1456-1467, 391).

 

b)

[De manière ponctuelle] : ...el en changea coleur, mua semblant, et pour ung peu en perdit la parolle. (C.N.N., c.1456-1467, 156). Il fut tant joyeux et tant surpris, quand il vit sa dame si belle et en si bon point, qu'il perdit force, sens et advis (C.N.N., c.1456-1467, 194). ...[l'âne] commença a recaner si hideusement qu'il n'y eut la si hardy qui ne perdist sens et memoire. (C.N.N., c.1456-1467, 383). ...a cest coup, bon mary perdit pacience et n'en peut plus oyr (C.N.N., c.1456-1467, 465). ...quand il la vit couchée au lict, demanda si pour ung seul jour qui restoit avoit perdu courage (C.N.N., c.1456-1467, 578).

B. -

"Égarer qqc." : ...ung laboureur avoit perdu son veau qu'il avoit mis paistre dedans un pré (C.N.N., c.1456-1467, 88). ...celuy qui perdu avoit le dit dyamant ne le vouloit laisser partir de ses mains (C.N.N., c.1456-1467, 393). ...des choses perdues on le tenoit vray enseigneur (C.N.N., c.1456-1467, 469).

C. -

"Mal utiliser, gâcher, gaspiller (ce que l'on possède)"

 

-

Perdre sa peine : ...m'amye, vous perdés vostre peine, ce n'est pas chose a nettoyer si en haste. Vous n'y sariez faire chose maintenant qui valust rien. [À propos d'une robe souillée] (C.N.N., c.1456-1467, 259). Qui fut bien mal content, ce fut celuy qui estoit venu de si loing perdre sa peine et despendre son argent, dont ce ne fut pas dommage. (C.N.N., c.1456-1467, 286).

 

-

Perdre (son) temps : Mon mary n'est point revenu, vous perdez temps. (C.N.N., c.1456-1467, 509). Ledit maistre d'ostel perdoit son temps, car, quelque chose chose qu'il sceut remonstrer, si [l'évêque] ne le voulut il croire (C.N.N., c.1456-1467, 582).

 

-

[D'un pari] : Or, monseigneur, vous avez perdu la gaigeure, vous le cognoissez [bien], faictes pas ? (C.N.N., c.1456-1467, 185). Cela feray je bien, monseigneur, dit elle, mais ce ne sera pas devant que vous ayez promis de moy paier de la gaigeure qu'avez perdue (C.N.N., c.1456-1467, 188).

D. -

"Voir échapper une possibilité, une éventualité" : Allez a l'ostel et les m'apportez, et vous avancez de retourner, que nous ne perdons la messe avecques tout nostre mal. (C.N.N., c.1456-1467, 260). ...vostre mariage (...) vous fera (...) plus grand bien perdre que vous n'y arez. (C.N.N., c.1456-1467, 284).

 

-

En partic. [De l'argent] : ...contraint fut d'abandonner le [mesnaige] et aller aux affaires qui tant luy touchoient, que sans y estre en personne il perdoit une grosse somme de deniers, et par sa presence il la povoit conquerir (C.N.N., c.1456-1467, 435).

 

-

Perdre son aventure de + inf. "Laisser passer l'occasion unique de" : En la fasson qu'avez oy dessus perdit monseigneur le curé son adventure de joïr de sa dame (C.N.N., c.1456-1467, 301). ...quand le dit Thomas vit qu'il avoit perdu l'adventure de la treuve du dit dyamant, fut bien desplaisant. (C.N.N., c.1456-1467, 394).

 

-

Par litote. Ne pas y perdre. "Gagner largement" : Et je te mercye, m'amye, dist madame, et soies seure que tu n'y perdras rien. (C.N.N., c.1456-1467, 248).

II. -

Empl. pronom. Soi perdre. "Aller à sa perte" : ...[j']ayme mieulx vous abandonner en me sauvant la vie, qu'en me perdant maleureusement vous entretenir. (C.N.N., c.1456-1467, 210).

 

-

[Constr. ambiguë, du fait de l'omission possible d'une forme de pron. pers.] : ...ne soiez en vostre opinion si ahurtée qu'en la soustenant vous perdrez corps et ame (C.N.N., c.1456-1467, 143).

III. -

Empl. abs.

A. -

"Être perdant" : ...il dist qu'il luy pardonnoit, mais pour ce qu'il pert a regret, le mot luy coustoit plus a pronuncer. [Il a "perdu" sa chemise, qui lui a été dérobée] (C.N.N., c.1456-1467, 400). Or bien force est que je perde ; si vault mieulx tost que tard. (C.N.N., c.1456-1467, 540).

B. -

"Mourir" : ...or es tu une femme perdue et qui fait bien a reproucher, quand par ta negligence as laissé cest homme perdre ! [Elle croit avoir, par négligence, causé la mort de son mari] (C.N.N., c.1456-1467, 367).

IV. -

Part. passé en empl. adj. Perdu

A. -

"Égaré" : La queste de ce dyamant dura longuement (...) pource qu'il estoit meschantement perdu (C.N.N., c.1456-1467, 44).

B. -

"Condamné à la destruction, à la mort"

 

1.

Au propre : ...il dit et veult conclure que le monde est perdu si son filz n'est tantost marié. (C.N.N., c.1456-1467, 296). Ha ! dit le curé, je suis perdu, mon fait est descouvert ; quelque ung nous a pourchassé ce passage. [Le mari l'a fait tomber dans une fosse] (C.N.N., c.1456-1467, 354). ...sitost que maistre cyrurgien vit cest oeil il le jugea comme perdu (C.N.N., c.1456-1467, 503).

 

2.

[Au sens fig. moral] : ...or suis je bien femme deffaicte, deshonorée et perdue ; et que dira mon mary, Nostre Dame ! quand il saura ce meschef ? (C.N.N., c.1456-1467, 39). ...si d'adventure mon maistre ou ma maistresse venoient icy, comme assez est leur coutume au matin, et vous trouvassent, je seroie perdue et gastée, et vous ne seriez pas le mieulx party du jeu. (C.N.N., c.1456-1467, 122). Or pensez que c'eust esté si ung aultre que moy vous eust trouvez ! Et, par Dieu, vous estiez gastez et perduz [Un flagrant délit d'adultère] (C.N.N., c.1456-1467, 433).
 

Cent Nouvelles Nouvelles Roger Dubuis

 Article 13/17 
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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[T-L : perdre ; GD : perdre ; GDC : perdre ; DÉCT : perdre ; FEW VIII, 221b : perdere ; TLF XIII, 64a : perdre]

I. -

Empl. trans. "Être privé de la possession ou de l'usage de qqc."

A. -

Perdre (un bien) : ...il avoit perdu, entre Chasteauleraut et Poitiers, ses bouges esqueles il avoit ces lettres, que il portoit à mons. de Berry et à l'evesque de Poitiers (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 538). ...l'en avoit desrobé la chambre d'une fille de vie appelée Gilete de Saint-Denis demourant en ladite rue des Escus et (...) elle avoit perdu un lit, une sarge et une paire de draps à lit, mais l'en ne savoit qui ce avoit fait. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 413).

 

-

Perdre (de l'argent) au jeu : Lequel argent icelli prisonnier perdi tout, ausdiz jeux, aus trois compaignons qui illec s'estoient assemblez, sanz ce qu'ilz jettassent coup de dé, ne couchassent ou engaigassent aucunement leurdit argent (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 139).

 

.

[Sans compl.] : Et dist qu'il n'est pas en la poissance d'omme, quel qu'il soit, s'il ne scet la maniere comment l'en jeue audit jeu, qu'il ne perdist à icellui. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 169). ...[il] parloit et intreduisoit eulx qui parlent de jouer aus croix et aus piles, et aussi au jeu de dez, disant qu'ils jouassent hardiment, et s'ilz perdoient, qu'il en paieroit la moitié (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 139).

B. -

Perdre la vue de qqn. "Perdre qqn de vue, ne plus l'apercevoir" : ...et quant il avoit yceulx eslongiez tant qu'ilz povoient avoir perdu la veue de lui, il se retournoit tout court par un autre chemin, le plus couvert qui savoit (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 57).

C. -

Perdre (une activité). "Faire inutilement, sans succès" : Lesquelles parolles par lui oyes et conceues, en soy regarda et advisa qu'il avoit perdu son voyage, et s'estoit pené et traveillié, et encores peneroit et traveilleroit sanz cause (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 521).

II. -

Empl. pronom. "S'égarer, se sauver" : ...et ont esté [les crapauds] soubz ledit auge jusques à hier, que l'un s'est perdu, et l'autre, lui qui deppose l'a fait tuer par ledit Jaquemin (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 339).

III. -

Part. passé en empl. adj.

A. -

"Mort, anéanti" : ...ledit Perrin Amiot lui dist qu'il faisoit que fol qu'il ne portoit tonsure, veu que souvent il se entrebatoit avecques compaignons, et que se d'aucune aventure il estoit prins par la justice laye, qu'il seroit perdus (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 80).

B. -

"Égaré" : ...l'en disoit que elle estoit devinerresse, et s'entremettoit d'enseigner les biens perdus (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 296).
 

Registre criminel du Châtelet Bernadette Suty / Monique Haas

 Article 14/17 
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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[T-L : perdre ; DÉCT : perdre]

Perdre langage. V. langage
 

Chastellain Martine Moulin

 Article 15/17 
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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[T-L : perdre ; GD : perdre ; GDC : perdre ; DÉCT : perdre ; FEW VIII, 222b : perdere ; TLF XIII, 58b : perdre]

I. -

Empl. trans.

A. -

Perdre qqn de vue. "Cesser de voir qqn" : Le quel Sazillé, semblant estre iré et courroucié, les poursuy un trait d'arc ou environ, disant qu'il sauroit quelz gens ilz estoient, dont ilz venoient et où ilz aloient, avant que il les perdesist de veue, et que il y avoit larrons sur le pays. (Doc. Poitou G., t.7, 1408, 152).

B. -

Perdre ses pas de + inf. "Entreprendre inutilement de faire qqc." : ...il leur dist qu'il avoit trouvé ledit Cheverron, en disant telles parolles ou semblables : "J'ay trouvé Cheverron là ou bois qui vient après nous et nous menace fort, et dit que nous perdons noz pas d'aler à Mauleon, et qu'il aura deux blancs de chacun de nous pour chacune lieue". (Doc. Poitou G., t.10, 1459, 168).

II. -

Part. passé en empl. adj. [D'une couleur] "Qui a perdu son intensité"

 

-

Vert perdu. "Vert sombre tirant sur le noir" : ...I quartier de fin vert perdu dont on a fait pour mondit sr de Charrolois une robe et un chapperon (Comptes Lille L., t.1, 1412, 76).
 

Chartes et Coutumes Edmonde Papin

 Article 16/17 
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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[DÉCT : perdre ]

I. -

Empl. trans.

A. -

"Être privé de la possession ou de la disposition de qqc."

 

1.

[Le compl. d'obj. désigne un bien matériel] : Cedit jour, J. Maignier, huissier, a dit que la veille de Pasques flories perdi son seel, si proteste que chose qui depuiz avoit esté seellée d'icellui ne lui prejudicie. (BAYE, I, 1400-1410, 316). ...le jour precedent, les seaulx de ladicte Ville avoient esté perduz par larrecin (FAUQ., I, 1417-1420, 50). ...et aussi declareront les dessus nommez la façon des calices qu'ilz ont perdus pour savoir que sera à faire (FAUQ., III, 1431-1435, 127).

 

2.

[Le compl. d'obj. désigne une qualité, un caractère inhérent] : ...pour ce qu'il estoit chargié de proposer en la Court, dont perdoit senz et memoire quant il consideroit sa foiblece et petitesse de son entendement et suffisance (BAYE, I, 1400-1410, 171).

 

3.

En partic. "Être privé de qqc. par une décision de justice" : ...et ne ly meffera, ne ne fera meffaire en quelque maniere que ce soit, à peinne de perdre tous ses biens et son corps à la volenté du Roy et de sa Court (BAYE, I, 1400-1410, 254).

B. -

"Faire un mauvais usage de qqc., employer inutilement" : ...lesdictes gens des Comptes dirent en delaiant que ilz ne diroient autre chose touchant ladicte cause, sinon en la presence du Roy, pour ce qu'il disoient que ce touchoit le Roy et son demainne, et par ce fu perdue l'eure. (BAYE, I, 1400-1410, 27).

C. -

"Ne pas obtenir l'avantage dans (un procès)" : ...sur peinne de perdre sa cause et d'estre banny des royaumes de France et d'Angleterre (FAUQ., III, 1431-1435, 59).

II. -

Part. passé en empl. adj. Perdu

A. -

"Anéanti" : Et à celle heure y ot dedens Paris gens affectez ou corrumpuz, qui esleverent une voix en toutes les parties de la ville deça et delà les pons, crians que tout estoit perdu, et que les ennemis estoient entrez dedens Paris (FAUQ., II, 1421-1430, 322).

B. -

Dimanche perdu. "Dimanche de la Passion (dernier dimanche de Carême, avant celui des Rameaux)" : Et le dimenche ensuivant, que on dit le dimenche perdu, gela si fort et si asprement que (...) tout fut ars et bruy de la gelée. (Journal bourgeois Paris T., 1432, 282).
 

Baye-Fauquembergue Denis Lalande

 Article 17/17 
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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[T-L : perdre ; GD : perdre ; GDC : perdre ; DÉCT : perdre ; FEW VIII, 221b : perdere]

I. -

Empl. trans.

A. -

Perdre qqc. "Être privé provisoirement ou définitivement de qqc."

 

1.

[La perte est d'ordre matériel : objet, bien, territoire ...]

 

a)

"Être dépossédé de" : Remondin, je ne vueil pas que tu laisses perdre l'eritaige qui est venuz de par tes ancesseurs en Bretaigne. (ARRAS, c.1392-1393, 48). Fol roy, par ta musardie te mescherra. Toy et les tiens decherront de terre, d'avoir, d'onnour et de heritaige, jusques a la IXe lignie ; et perdra par ta fole emprise le IXe de ta lignie le royaume que tu tiens. (ARRAS, c.1392-1393, 305).

 

-

[En partic., à la suite d'un combat, d'un fait de guerre] : La veissiez fier touilleiz ; mais en la fin Sarrasins perdirent le pont, et en chey pluseurs en la riviere. (ARRAS, c.1392-1393, 102). Et il passe le pont et vint dedens, et vint descendre ou lieu ou il avoit acoustumé de descendre, avant ce qu'il se apperceust qu'il eust perdu sa forteresse. (ARRAS, c.1392-1393, 204).

 

.

Perdre (la) place : Lors passent crestiens le pont moult ysnellement, et lors commenca fiere la bataille, et y ot moult de mors et de navrez, et reculent ly Sarrasin, et perdent place grandement. (ARRAS, c.1392-1393, 102). Atant estevous Poictevins qui leur ruent et se fierent en la presse par telle vertu que les Sarrasins perdent la place. (ARRAS, c.1392-1393, 138).

 

.

Pouvoir plus perdre que gagner : Et le soudan fait laissier l'escarmouche, car il voit bien qu'il y puet plus perdre que gaignier. (ARRAS, c.1392-1393, 98).

 

-

"Subir la confiscation de" : Et le lendemain, par matin, après la messe ouye, firent crier les deux freres, sur peine de perdre chevaulx et harnoiz et d'estre banny de leur compaignie, que chascun chevauchast tous armez soubz sa banniere, en belle bataille. (ARRAS, c.1392-1393, 155).

 

b)

"Laisser échapper, ne pas pouvoir maintenir à sa place" : Et fu le soudant si chargié du coup qu'il fut si estourdiz qu'il ne voit ne entent, et pert le fraing et les estriers, et l'emporte le cheval partout ou il lui plait. (ARRAS, c.1392-1393, 113).

 

2.

[La perte est d'ordre plus général (matériel, spirituel, affectif ...)] : Mon amy, puis que je me sui mise si avant, il m'en fault attendre la voulenté de Dieu et moy confier en vostre promesse. Or gardez que vous ne me failliez de convenant, car vous seriez cellui qui plus y perdroit après moy. (ARRAS, c.1392-1393, 42).

 

-

Ne rien perdre à qqc. "N'avoir rien à y perdre" : ...et disna Gieffroy avec le prieur, et lui dist en confession comment Remond estoit son pere, et comment il se prenist garde de lui, et que l'eglise n'y perdroit rien, et qu'il le vendroit veoir une foiz l'an, tant comme il vivroit. (ARRAS, c.1392-1393, 279).

 

-

Prov. : Il nous sera bien mal advenu se nous perdons nostre roy et nostre damoiselle. Le pays sera en grant orfenté de seigneur qui le gouvernera. Beaulx seigneurs, dist le cappitaine, il n'est pas tout perdu quanqu'il em peril gist. Ayez fiance en Jhesucrist, et Il vous gardera. (ARRAS, c.1392-1393, 114).

 

3.

[La perte est d'ordre physique]

 

a)

[Suj. animé] : Et aussi le roy affeblissoit fort, et avoit moult de sang perdu. (ARRAS, c.1392-1393, 106). L'espee fu bonne et bien trenchant ; si lui trencha le braz devant le coute, si que il vola par terre. Moult fu le jayant esbahy quant il ot perdu son bras. (ARRAS, c.1392-1393, 247).

 

-

En partic. Perdre la vie. "Mourir" : ...et l'autre partie faisoient grant doulour pour la blesseure du roy, dont on disoit que il n'y avoit remede nul qu'il ne perdist la vie. (ARRAS, c.1392-1393, 114).

 

.

Perdre corps. V. corps

 

b)

[Suj. inanimé] Perdre sa force. V. force

 

4.

[La perte est de l'ordre de la perception]

 

-

Perdre la vue de qqn/de qqc. "Cesser de l'apercevoir, le perdre de vue" : Et fu la galleote si esloingniee en pou de heure que nos gens en perdirent la veue, et virent bien que le suivir leur pourroit plus nuire que il ne leur pourroit avancier. (ARRAS, c.1392-1393, 139). Cellui chevalier se party, lui Xe. de chevaliers, tous armez, et suivoit Gieffroy de loing tant que oncques n'en perdy la veue. (ARRAS, c.1392-1393, 198).

 

-

Perdre la trace (d'un animal que l'on chasse) : ... le porc tourne et se met au cours par telle maniere qu'il n'y ot chien ne chevalier ne homme qui n'en perdist la trace et veue (ARRAS, c.1392-1393, 19).

 

5.

[La perte est d'ordre moral] : Haa, Melusigne, dist Remond, dame de qui tout le monde disoit bien, or vous ay je perdue sans fin. Or ay je perdu joye a tousjours mais. (ARRAS, c.1392-1393, 243).

 

6.

[La perte est de l'ordre de l'action]

 

a)

"Gaspiller, faire mauvais usage de"

 

-

Perdre ses paroles. V. parole

 

b)

"Compromettre, exposer à l'échec (une entreprise)" : Et pour ce je vous prie que, s'il a en ceste place homme qui ne sente son cuer ferme pour actendre l'adventure qu'il plaira a Jhesucrist de nous envoier, qu'il se traye a part, car par un seul couart failly est aucunesfoiz une besoingne perdue. (ARRAS, c.1392-1393, 109).

B. -

Perdre qqn.

 

1.

"Être séparé de qqn par la mort" : Par foy, fait ly uns, assez devons dueil mener, car nous perdons le meilleur roy et le plus preudomme qui oncques feust en ce royaume. (ARRAS, c.1392-1393, 114). Ma fille, laissiez ester ce dueil, car, en chose qu'on ne puet amender, c'est folie de s'en donner trop grant courroux, combien que c'est raison naturelle que la creature soit doulente de son amy ou de son proesme, quant on le pert. (ARRAS, c.1392-1393, 120).

 

-

[En parlant de combattants tués à la guerre] : Et sachiez que payens perdirent celle matinee plus de XXVm. Sarrasins qui furent mors par armes (ARRAS, c.1392-1393, 233).

 

2.

"Être privé de la compagnie et de la présence d'un être aimé" : Et tant qu'ilz [les maris de fées] leur tenoient leurs convenances, ilz estoient regnans en grant audicion et prosperité. Et si tost qu'ilz defailloient, ilz les perdoient et decheoient de tout leur bon eur petit a petit. (ARRAS, c.1392-1393, 4). Je [Remondin] vous ay [Mélusine] par mon faulx venin trahie. Helas, vous m'aviez mediciné de mon premier crueulx venin. Or le vous ay je crueusement mery, quant je vous ay trayee et menty ma foy envers vous. Par Dieu, se je vous pers pour ceste cause, je m'en yray en essil en tel lieu ou on n'ourra jamais nouvelles de moy. (ARRAS, c.1392-1393, 243).

 

-

Au passif : Dont remort conscience a Gieffroy, et lui souvint comment il avoit ars les moynes de Maleres, et l'abbé, et son frere Fromont, sans raison, et que par ce pechié avoit esté sa mere perdue. (ARRAS, c.1392-1393, 274).

 

3.

"Cesser d'apercevoir" : Respondez que vous ne le veistez depuis que la chasse commenca a estre forte, et que lors le perdistes en la forest de Colombiers, comme pluseurs firent, et vous en esbahissiez comme les autres. (ARRAS, c.1392-1393, 26).

 

4.

"Laisser échapper"

 

a)

[Le compl. d'obj. désigne un ennemi] : Mais il y convient mettre garde, car par ce pourrions nous perdre les chiefs et les plus grans, qui nous pourroient depuis nuire. (ARRAS, c.1392-1393, 135).

 

b)

[Le compl. d'obj. désigne un cheval]

 

-

Prov. : ... c'est mauvaise compaignie que de traitours. Il fait bon fermer l'estable avant que le cheval soit perdu. (ARRAS, c.1392-1393, 74).

 

5.

[Au sens actif] "Provoquer la défaite de qqn" : ... il rua moy et mon cheval par terre si durement que je n'oy ne entendy, et juz long temps a la terre tous estourdiz. Mais Mahon, qui pas ne me vouloit perdre, m'envoya secours de LX. Sarrasins (ARRAS, c.1392-1393, 234).

II. -

Part. passé en empl. adj.

A. -

"Gâché, gaspillé"

 

-

Peine perdue. "Entreprise inutile" : Cest homme ne puet longuement durer, car il ne craint rien ; ne aussi de lui conseillier est peine perdue, car on m'a bien dit pieca, dist le duc Anthoine, qu'il ne veult riens faire fors sa pure voulenté. (ARRAS, c.1392-1393, 283).

B. -

"Conduit à sa perte" : Monseigneur, se ne feust la grace de Nostre Seigneur et la puissance de monseigneur vostre frere et de vous, ceste povre orpheline estoit desolee et perdue, lui et son pays, et cheue en grant adversité entre les mains des Sarrasins. (ARRAS, c.1392-1393, 192).
 

Arras Jocelyne Bernardoff / Jean-Loup Ringenbach

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